Les Ritons-Tritons.

Direction la piscine, pour me vider la tête, elle est sous l'eau.
Et peu importe les mosaïques Odorico quand je pousse la lourde porte, c'est bien l'odeur du chlore qui fait blanchir les idées noires. Nous sommes pourtant loin du Grand Bleu, il faut faire la queue pour badger et se déshabiller et se doucher le plus vite possible au début et à la fin car le forfait est décompté par demie-heure. Dans l'eau, il faut doubler, redoubler, se faire doubler, attendre son tour, se prendre des coups de pieds et des coups de palmes. Je respire en rythme sans boire la tasse, mais j’aspire à plus de liberté pour faire moins de vagues. Je ne suis pas le seul, et trop souvent je sous-estime l'imagination et la réalité de certains.
Car je peux officiellement devenir triton !
D'abord en club, puis en spectacle, puis en mer. Avec mes copines sirènes des clubs de mermaiding, que le français insiste pour traduire malheureusement en sirenage, nous prendrons notre pied, dans notre queue, pour faire échouer avec nos champs envoûtants, certainement à l'aide d'un vocodeur, les Icons of Seas (que le français ne traduit pas en Icônes des Mers). Le refus de croire en notre aquaterrorisme laisseront de nombreux croisiéristes sur la paille, ou plutôt sur les récifs. Certains, tout de même, recruteront seulement des capitaines nommés Ulysse (big-up à mon filleul) qu'ils attacheront aux mâts décoratifs des paquebots de fortune (au sens propre), et verseront de la cire dans les oreilles de l'équipage pour s'assurer qu'il tienne bien le système de navigation et reste loin des écueils. Sauf que nos chants démoniaques, disponibles sur Youtube et Spotify, rendront fous les passagers, qui se jetteront par dessus bord. Ce sera le retour des gilets jaunes, de sauvetage, pour dénoncer la mascarade du tourisme de croisière.
Je ne rentre pas dans les détails, mais les paquebots, ça pollue sa mer.
J'attends la livraison de ceux à voile (big-up aux Finistériens de Grain de Sail qui importent leur café à la force du vent) et j'invite ceux qui ont l'impression de vivre en apnée, d'avoir la tête sous l'eau et de parfois frôler les abysses, à se rendre dans le club de mermaiding le plus proche de chez eux. L'activité est reconnue par la Fédérations Française de Sports Sous-marins, il est donc possible de créer votre propre club, si vous n'en trouvez pas. Et si vous avez besoin d'arrondir vos fins de mois, les sirenistes et tritonistes sont officiellement des intermittents du spectacle. Sachez d'ailleurs que la concurrence n'est pas encore trop rude. Plus d'excuse donc pour ne pas se jeter à l'eau, tant que ce n'est pas dans la Manche en février (tant pis pour moi). Si néanmoins vous n'êtes pas du genre à vous mouiller et que vous êtes plutôt tricot devant La Petite Sirène, sachez que ces artistes sous-marins recherchent des stylistes pour confectionner leurs costumes. Bref, il fait du bien ce monde pas si imaginaire, je dépose immédiatement une demande pour la création du club des Ritons-Tritons.