Odyssées.

Dimanche dernier.
Quand certains avaient voile ou vélo, j'avais virus. Le lit qui tangue, des virages dans l'estomac, après vantardises la veille d'être passé au travers depuis le début de l'hiver. Des nausées avant le vingt janvier, jour de salut (nazi) pour l'Amérique, date d'anniversaire de la naissance de Martin Luther King Jr. Largement de quoi tomber malade, d'avoir des vertiges, de vomir, de trembler, de perdre la tête. On dénombre déjà des millions de cas MAGA en Europe, de son variant MEGA, mais ni remède ni vaccin à l'heure où j'écris. La connerie se propage à la vitesse Starlink, il n'y a pas que l'OMS qui s'inquiète. Un rappel est nécessaire : la rage est presque toujours fatale une fois les symptômes déclarés, elle se transmet par la salive, le politique montre les dents et postillonne.
2001.
Quand certains rêvaient de conquête spatiale, Emmanuel regardait le premier volet de la saga Harry Potter. Nous sommes en 2001, Emmanuel a vingt-quatre ans. Il dit à ses détracteurs qu'il n'y a pas d'âge pour aimer la fiction, encore moins le fantastique. Il découvre un monde magique, déconnecté du réel, dans lequel évolue des sorciers qui se moquent bien des moldus, ces petites gens de l'autre côté de la plateforme 9 3/4. Dans ce monde de compétition s'affrontent quatre familles composées selon les caractères et aspirations individuels. L'objectif est de gagner des points, de plaire à celui qui dirige, aux pleins pouvoirs, indéboulonnable depuis des décennies : Albus Dumbledore. Un rappel est nécessaire (spoiler alert) : il annonce Serpentard gagnante à la régulière, laisse la joie de la famille éclatée, avant de prononcer un bref discours. Finalement, il préfère quatre personnes de la famille Gryffondor, qu'il décide de proclamer gagnante, sans consultation. Devant son écran, Emmanuel est fasciné.
Dimanche prochain.
Je fais des parallèles, des rappels, des rêves, des cauchemars. Je me demande de quoi sera fait demain, désormais littéralement. Chaque jour est une odyssée, chaque jour, on est à deux doigts de tout péter. Contagion numérique, identités multipolaires, fièvre hystérique, emballement médiatique, à chaque jour ses morts. Suis-je paranoïaque, hypersensible, hypocondriaque ? Du haut de ses cent ans, Marguerite me parlait la semaine dernière d'Apocalypse, n'a-t-elle pas le recul idéal pour juger ? Elle me dit qu'elle vit elle au jour le jour, ne pense même pas à demain, encore moins à dimanche prochain. Je n'arrive plus non plus à anticiper, impossible d'écrire une ligne en avance sans avoir peur de me tromper. D'ailleurs, il est déjà 9h30 et je dois rapidement trouver une illustration pour ce billet. Je cherche "Odyssée" sur Unsplash. Ce n'est ni Ulysse ni un bateau perdu en mer au milieu de la tempête que je trouve : ce sont des photos sous tous les angles du Tesla Cybertruck, Odyssey...