Sept à la maison.

Une famille en or.
Même si de l'or, on n'en avait pas. Du plaqué or, très peu. Les gourmettes de communion étaient en argent, les croix en bois. Les bijoux de famille ont servi à faire cinq gosses, et pas forcément des perles. Faut dire que les perles sont plutôt rares et chez nous on est plutôt nombreux, c'est notre côté généreux. Mais peu importe la valeur, peu importe la forme, peu importe le matériau, la chaîne chez nous, c'est du solide, pas de maillon faible. C'est pour ça que j'aurais bien aimé passer sur le plateau d'Une famille en or, même si on serait peut-être rentré bredouille. Les jeux d'argent, on essaye depuis toujours, mais on a préféré être heureux en amour.
Berverly Hills, 90210.
Brenda, Brendon, Kelly, Steve, Donna, David. On avait que le David en commun, mais c'était pas David Silver, il y avait vraiment que la gourmette en argent. On regardait les palmiers depuis nos canapés, assis sur les accoudoirs fatigués, assiettes individuelle de chips et sauce ketchup. Le home cinema chaque semaine, un samedi soir sur la Terre où Dylan McKay remplaçait Francis Cabrel pour faire chavirer tous les coeurs. On passait nos week-ends en Californie : Beverly Hills, Malibu, Melrose Place, on connaissait par coeur. On vivait le rêve américain depuis Kergoal 29260, en version doublée en français, avec les tracteurs et les moissonneuses qui passaient à quelques mètres. On était finalement les plus chanceux, si Daren Star nous avait connu, on lui aurait inspiré une autre série.
Coeurs à vif.
N'a-t-on vraiment jamais su que le lycée d'Hartley se trouvait en Australie ? Certes, ils allaient au lycée quand on rentrait de l'école, il y avait un décalage, mais sur France 2 ils parlaient tous français. Pourtant, avec un peu de recul (désormais), c'est vrai qu'on n'a jamais eu des camarades qui s'appelaient Bolton, Drazic ou Rivers, qui venaient au lycée en roller ou qui vivaient dans un loft. Peu importe, ils étaient quand même nos potes et on avait qu'une seule hâte, sauter du car qui nous déposait devant la maison après une journée d'école ennuyeuse pour reprendre une dose d'école où les drames faisaient rêver. Ce n'est pas Rocky qui a marqué notre jeunesse, c'est le combat de boxe de Nick Poulos. Putain, Nick... Pauvre Jodie, ça me remue encore. Ou est-ce cette époque où on était tous ensemble, Sept à la maison, à profiter des ces instants suspendus, à croire que quand les choses déconnaient, il suffisait de taper sur la télé, à penser que les séries et les saisons ne s'éteignent jamais ?